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Une trêve

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On passe notre vie à courir. Vers ces rêves qu’on s’est juré de réaliser un jour et nos petits espoirs plus immédiats. Tant pis si tout cela ne va pas dans le même sens. Pour corser les choses, on passe notre temps à se mettre dans les pattes de nouveaux défis. Le plaisir, il paraît, de se sentir vivant.

On a beau jurer le contraire : tous les œufs sont dans le même panier, maintenus dans un équilibre précaire. Et l’on sait qu’il faudra bien en casser un ou deux pour espérer amener tous les autres à bon port. Mais d’ailleurs, c’est où exactement Bon Port? Aucune idée. Alors on se contente de sprinter en levant haut les pieds pour éviter les nids de poule vers une destination dont on n’est pas très sûrs.

Bien sûr, c’est complètement contradictoire, une allure pareille – pour ne pas dire complètement con tout court : débouler comme ça, avec l’énergie du Diable, vers on ne sait pas où… franchement. Mais est-ce qu’on a le choix?

Et comme si ce n’était pas déjà bien compliqué, cette histoire, on court main dans la main avec une ribambelle de personnes, de croyances, de valeurs qui se chevauchent comme elles peuvent, souvent pas très bien, d’ailleurs. Quel bazar! Les rythmes sont différents : la plupart du temps, soyons honnêtes, on a l’impression qu’ils nous ralentissent. Mais parfois, au contraire, ils nous propulsent ; nous font gagner des kilomètres à la vitesse de la lumière, alors bien sûr, on continue de s’accrocher les uns aux autres.

Et on doit courir vers tout ça à la fois, sans répit : une seule direction pour toutes ces choses qui n’ont pas tellement de liens entre elles, finalement. On en laisse certaines en chemin en espérant les retrouver plus tard. On prend des risques, lorsqu’on n’est pas très sûr d’un itinéraire donné. On glane aussi des fruits inattendus, parce qu’ils se trouvent là, ici et maintenant et qu’on ne les reverra sans doute jamais plus. Et puis qui sait si ce ne sont pas ces fruits-là, justement, qui plus tard, nous aideront à avancer encore dans une période de disette?

Et quelquefois enfin, il y a cette impression, qu’on a couru toute sa vie pour en arriver là. Exactement à cet endroit. Voilà, on est arrivé. Quelques secondes, quelques minutes ou bien quelques années durant lesquelles on ne voit plus de raison de courir comme des dingues. Le paradis existe, il est là qui nous attend depuis toujours. Et entre nous, on estime qu’on l’a bien mérité. Alors on souffle, enfin.

Jusqu’à ce qu’elle nous démange à nouveau, cette envie de courir. On se demande bien pourquoi, mais c’est comme ça. Elle est là, on ne peut l’ignorer. D’ailleurs, il arrive un moment où ça démange tellement qu’on sait qu’on n’a plus le choix: c’est une question de survie. Alors, peut-être pour se donner du courage, on se prend à croire qu’on s’est peut-être trompé de Paradis, après tout. Qu’il en existe un autre un peu plus loin, là, derrière la colline. Et voilà qu’un matin, on y est de nouveau sur cette fichue route devant laquelle on se sent déjà exténué,  avec, pour toute boussole, un itinéraire insensé qui n’a aucune destination.

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30 réflexions sur “Une trêve”

  1. Nos vies me semblent tellement parallèles parfois… Toujours courir vers de nouveaux projets, toujours avoir envie, toujours rêver. Je viens de terminer un projet, je suis en train d’en finaliser un autre et déjà, je lance de nouveaux espoirs dans de nouvelles aventures.
    Bises.

  2. Bonjour,
    Je te lis depuis longtemps, sans jamais commenter, mais la je dois te dire que ton texte est magnifique, extrememtn juste et donc totalement touchant.
    je vais le relire tiens.

  3. Bonjour anne-so,
    comme Agathe plus haut, je suis une lectrice de l’ombre, depuis longtemps, plusieurs années maintenant…Et jamais l’ombre d’un commentaire laissé. Je voulais juste te dire merci, merci d’écrire comme ça.
    J’ai 21 ans, je suis au début du chemin, pleine de rêves et de projets…Ce texte me parle.
    Merci à toi, pour ça, et le reste aussi.
    Bises.
    J.

  4. Oui courir puis s’arreter… J’ai vecu ca il y a quelques annees, j’ai pose mes valises a Edimbourg et j’ai eu l’impression que j’etais enfin chez moi. J’ai rencontre mon Ecossais et puis lui a eu envie de bouger, de courir… Londres, Paris et NY… Et de nouveau cette impression d’etre chez moi… Et nous revoila a Paris. Tes photos me font rever, elles me rappellent les Hamptons hors saison.
    L’ocean, des plages qui ne s’arretent pas, de longues marches a refaire le monde ensemble. Ca va me manquer.

  5. Je pense que ce billet va faire sortir de leurs terriers toutes tes lectrices de l’ombre (dont je fais aussi partie), je n’ai qu’un commentaire à faire à la lecture de ces mots et sentiments si justes, accompagnée d’une petite musique Prayer in C de Lilly Wood & The Prick : ca devient juste magique !

    Ne t’arrête pas en si bon chemin…

    Merci+++++

    Manoush

  6. c’est tellement juste quand on est actif/ve !
    Et maintenant, je connais la situation inverse, à la croisée des chemins, je fais du sur place ne sachant pas trop (ou si lentement) vers où me diriger….

  7. Toi alors tu es magique ! J’ai rarement lu un texte comme celui ci qui me parle autant ( sans compter Hermann Hesse cf Narcisse et Goldmund) !!
    Je lis surtout des écrits bouddhistes, mais là j’ai envie de lire des pages et des pages comme celle là, aussi belles, aussi intenses, et surtout aussi vraies.
    Là j’ai des petits frissons^^ tellement des petites phrases qui s’enchainent si bien me touchent.
    Il faut vraiment que tu fasses quelque chose de ta plume, je te l’ai déjà dit, et je sais que le monde de l’édition n’est pas facile, mais cours y :clin
    Bises

  8. Un texte typique d’une parisienne ça ! :clin
    Et alors quand on a un enfant mais qu’on veut continuer à faire plein de trucs et à avoir plein de projets, on a son ptit coin de paradis, mais on court encore plus ! :clin :clin

  9. Comme c’est joliment écrit !!!
    Merci, c’était un vrai bonheur à lire…

  10. C’étrange ce que tu racontes. En ce moment, je suis dans un creux, au fond d’une vallée tellement profonde qu’il me paraît impossible de reprendre la route vers les sommets. Alors en courant, j’y pense même pas.
    Peut-être que justement, parce que il ne me semble avoir personne par la main. Mais il suffit peut-être de la tendre.

  11. Alala comme ça me parle !!!
    Je viens à peine de lancer mon site internet, me créant du même coup un job/plaisir, que demander de +, le pied quoi !
    Et déjà je sens un truc qui me démange, j’en veux davantage !

    Mais n’oublions pas que ce petit Paradis temporaire dont tu parles, n’est jamais un Paradis Perdu ! :)

  12. Courir, courir… encore courir… Mais comme il est bon, lorsque le nez décolle un peu de son guidon, de flâner au vent et de s’apercevoir que tout est là et que la bicyclette peut rester un moment contre ce réverbère, après tout, le bonheur est ici et maintenant… ^^

    Merci pour ce texte,

    Bises

  13. Je vois qu’on a tous ressenti la même en te lisant.

    Ton texte permet l’espace de deux minutes, de s’arrêter, réfléchir à ce qui nous motive, nous pousse ou nous bloque.

    j’irais bien sur la plage, respirer un grand coup et ne rien faire car selon moi le vrai Luxe dans une vie c’est de savoir ne rien faire et prendre son temps…

    Bravo

    http://www.chocolatetvieillesdentelles.com

  14. A quel moment peut-on considérer que l’on a réussit quelque chose si on ne peut jamais s’arréter et profiter de la vue ?
    Que j’aime quand tu te remets à tes contes philosophiques. Je me sens alors étrangement proche de toi, suivant le rythme de tes pensées comme si elles coulaient de moi. ah non ce sont des larmes qui coulent. Des larmes de fatigue car pendant que tu fais cette pause, je dois encore courir, alors que mes yeux restent sur cette plage.
    Merci pour ce texte, merci pour ces images, merci pour cette presque pause.

  15. Envie d’une trêve aussi, que tous les essentiels à ma vie se pose (un appart et un job dans la com), pour enfin me consacrer à d’autres réalisations.

  16. Parce que vivre, c’est vibrer,
    Parce que vivre, c’est rêver,
    Parce que vivre c’est créer,
    Parce que vivre c’est se réaliser,
    Parce que vivre c’est l’espoir toujours renouvelé,
    Parce qu’on est peut être toujours en quête,
    Parce que vivre c’est continuer ….
    ;-)

    [C’est bien vrai ce que tu dis, et joliment dis ;-) ]

  17. Parce que nous savons que le bonheur est éphémère, qu’il s’engouffre comme un courant d’air par cette porte restée entrouverte. la poignée a disparu, le bonheur s’en ira. peut-être que nous préférons ne pas assister à son départ. partir. avant lui. des bises, très belles photographies, très beau texte.

  18. Tres beau texte, c’est tellement vrai. Je pense que c’est la societe daujourdhui qui veut ca. On veut tout, tout de suite.

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