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Trop grande pour moi

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Lorsqu’il a commencé à être question de cette croisière, l’évocation de la visite de St Petersbourg dans mon entourage n’a fait que provoquer des Oh et des Ah d’excitation. Pour ma part, je sentais que la ville avait peu de chance de me séduire, mais gagnée par l’enthousiasme des autres et désireuse d’être dans de bonnes dispositions d’esprit, ne serait-ce que pour ne pas montrer d’ingratitude devant une très belle opportunité, j’avais fini me mettre au diapason général et même à percevoir la visite de la ville un peu comme le clou du voyage.

Après quelques heures passées en ville, je peux désormais dire que je me suis rarement sentie aussi étrangère à un lieu. La beauté y est pourtant omniprésente, indéniablement. Tout est massif, immense, imposant, mais je dirais pour ma part un peu terrifiant. L’humain, proportionnellement à la masse architecturale semble s’y mouvoir comme une fourmi perdue au cœur d’une fourmilière. Tout porte la marque d’une recherche perpétuelle de grandeur. L’architecture, l’art me sont apparus comme autant de démonstrations de puissance, j’irais même jusqu’à dire comme une méthode d’intimidation.

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De la même façon, la méthode du guide, soucieux uniquement de nous démontrer les immenses qualités de sa ville, m’est d’abord apparue comme une sorte de bourrage de crâne déplaisante. Nous avons senti une vraie réticence à nous présenter ce que nous appelions le « vrai » St Petersbourg et que nous lui réclamions tous en choeur. Comme s’il trouvait notre requête vulgaire ou déplacée : pourquoi perdre de précieuses minutes à s’abreuver du quotidien quand il y a tant de belles choses à examiner et si peu de temps pour le faire? Il n’a d’ailleurs pas pu se résoudre, malgré toute nos supplications, à nous emmener manger un petit gâteau dans une bonne pâtisserie.

Vers le milieu de l’après-midi, nous étions tous assez fâchés, je crois. Notre guide aussi, apparemment désarmé par notre manque de réceptivité au message d’excellence qu’il voulait nous transmettre. Curieux specimens que ces personnes seulement désireuses de flâner le nez au vent alors que Leonard de Vinci, Rodin, Poussin, Caravage et autres Michel Ange attendaient d’être admirés derrière les portes de l’Ermitage. C’est dans ce climat un peu tendu que nous avons traversé la ville et appréhendé ses beautés.

Mais à la réflexion, dans quel état d’esprit serais-je si mon pays, ma ville et ses richesses avaient été cachés aux yeux du monde pendant si longtemps? J’aurais sans doute à coeur de le défendre farouchement, d’accumuler les belles images dans le regard des visiteurs quitte à me montrer insistante, à forcer leur attention pour prouver que la ville à sa place parmi les monuments du monde. Et puis, je ne sais pas. Peut-être que le quotidien saigne encore de blessures mal fermées ou que tant d’années d’isolement ont fait naître une sorte de pudeur chez les habitants de la ville. Peut-être après tant d’années à l’abri du monde ne tient-on pas à se laisser observer de la sorte?

Pour cette fois, nous n’aurons pas la réponse et c’est ainsi que d’une certaine façon, les portes de Saint Petersbourg nous sont restées fermées.

Mais lorsque nous avons quitté le restaurant – il était plus de 22 heures et il faisait encore grand jour – la pluie n’avait toujours pas cessé. Elle alourdissait l’air d’une masse compacte au raz de l’eau et furtivement, j’ai aperçu toute la mélancolie du monde s’étendre le long des quais. Un soupir de la ville, peut-être, déçue de n’avoir pas été comprise. C’est cette derrière image que j’emporte avec moi.

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18 réflexions sur “Trop grande pour moi”

  1. J’y suis allée il y a presque 11 ans… En 3 jours, je n’avais pas eu le temps de prendre la mesure de la ville, ça me semblait déjà trop court !

    J’ai le souvenir d’un superbe Ermitage.

    Nos guides russes étaient assez particuliers aussi. Notre guide moscovite était très dérangée par la volonté d’aller voir le mausolée Lénine (…), elle tenait absolument à nous arrêter devant les grandes bâtisses pour les photos…

    Il faudra que j’y retourne pour comprendre mieux !

  2. Je n’y suis jamais allé, je ne sais pas non plus si ça serait ce que j’aime. J’ai toujours voulu aller dans ces pays, j’espère, et je pourrais moi aussi essayer de mieux comprendre:)

  3. La Russie est un pays qui a beaucoup souffert et qui souffre encore… Pour avoir fait une croisière St Petersboug-Moscou, je peux dire qu’ils ont des richesses magnifiques, mais que la misère (car c’est bien plus que de la pauvreté) est bien présente et qu’elle n’est pas ce que les Russes souhaitent montrer de leur pays…
    1 journée pour St Petersbourg n’est absolument pas suffisante mais je te rejoins dans la démesure de la ville dans laquelle on se sent minuscule…

  4. J’aime beaucoup la façon dont tu décris la ville, j’ai vraiment l’impression de ressentir ce sentiment que tu décris. J’aime beaucoup comment tu écris mais là je dois avouer que ce texte est particulièrement beau et inspirant. Bravo et merci.

  5. J’étais à St Pétersbourg il y a 9 ans. A la fin de la première semaine, je ne supportais plus les dorures partout, je faisais une overdose. Je logeais pourtant dans un quartier bien moins glamour… Et puis, petit à petit, la ville s’est imposée, à coups de sorties tardives, de péniches sur la Neva, de bars flottants, et de métro quotidien.
    Je crois que c’est une ville qui mérite qu’on lui donne sa chance, mais je comprends très bien ton premier sentiment, pour l’avoir moi-même expérimenté sourit

  6. Difficile de comprendre certaines réactions « étrangères » parce que les personnes qui les ont sont imprégnées d’une culture et d’une éducation si différente de la nôtre, que ça peut faire choc au début.

    Mes grands parents, assez traditionalistes ont eu droit à un guide comme le tien quand ils ont visité St. Petersbourg, ils étaient ravis. sourit

  7. J’ai visité St Petersbourg et Moscou il y a 7 ou 8 ans. Je ne rêve que d’y repartir. Par contre, j’avais choisi l’option « Séjour chez l’habitant » … j’ai découvert le marché, les musées et la ville avec des autochtones … une chance !!!

  8. j’y suis allée en plein hiver – il faisait – 25 ° les rues étaient comme figées dans la glace et la neige – la lumière était magnifique – on avait alors l’impression qu’un vieux carosse allait surgir de nulle part – Pour ma part je garde un merveilleux souvenir de mes 7 jours là bas. Le soir avec des amies, on se balladait dans les rues, on allait boire un verre dans des petits bars . Cette ville m’a beaucoup émue mais je comprends ton sentiment – ceci dit je rêve d’y retourner – en hiver !

  9. Ca avait vraiment l’air étrange cette visite: le pauvre guide qui s’évertue à vous montrer des trucs, auxquels personne n’accroche … :(

    Mel

  10. je n’y suis jamais allée … Les photos sont superbes, ça donne envie de voir toutes ces belles choses en vrai !

  11. I wish I knew that you’ve visited our city few days ago! I would like to show our ‘Peter’ specially for you (: That is true that our north capital has ‘heavy’ character.. And you were able to catch it and feel it..!

    I wish you more bright impressions and colorful moments.. sourit

    [one russian girl,who admires your pictures and texts.. (: ]

    1. Hi, I’ll be in St-Petersburg in August and I can’t wait. We are arriving by boat, but I don’t want to take a tour (hate that). How can I get around otherwise ?
      Thanks !

Les commentaires sont fermés.

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